La loi du 27 juin 2018 réformant le droit de la famille : l’instauration d’une procédure accélérée et simplifiée en matière de divorce pour rupture irrémédiable des relations conjugales

ARTICLE

REAL, Avocats à la Cour

 

 La loi du 27 juin 2018 instituant le juge aux affaires familiales, portant réforme du divorce et de l’autorité parentale, applicable à compter du 1er novembre 2018, a considérablement modifié les cas d’ouverture prévus pour divorcer.

 

Les cas d’ouvertures précédents relatifs au divorce pour faute (ancien article 229 du Code civil), divorce pour séparation de plus de trois ans (ancien article 230 du Code civil) et divorce pour séparation de plus de cinq ans en cas de maladie (ancien article 231 du Code civil) se retrouvent ainsi supprimés.

 

En effet, conformément au nouvel article 229 du Code civil, le divorce pourra être prononcé dans deux cas : soit par consentement mutuel, soit pour rupture irrémédiable des relations conjugales.

 

L’analyse du nouveau cas d’ouverture tel qu’institué par la loi du 27 juin 2018 a pour finalité d’instituer des avantages considérables dans le but de remédier aux lacunes qui avaient été relevées dans le cadre des procédures contentieuses, concernant à la fois la durée particulièrement longue de la procédure de divorce contentieuse ainsi que les dérives tenant à la difficulté voire l’impossibilité de divorcer en l’absence de preuve d’une faute ou de consentement des deux époux à divorcer (A).

 

A l’inverse, la réforme du divorce par consentement mutuel telle qu’opérée par la loi du            27 juin 2018 fait apparaître une perte d’efficacité en matière de rapidité pour mettre un terme au mariage des parties et semble revêtir désormais une certaine complexité procédurale (B).

 

A – Les mérites de la rupture irrémédiable des relations conjugales : célérité et simplification de la procédure de divorce

 

La réforme prévoit que le divorce pour rupture irrémédiable des relations conjugales peut être demandé, par l’intermédiaire d’un Avocat à la Cour, soit de manière unilatérale par l’un des conjoints, soit par les deux époux conjointement si un accord est trouvé quant au principe du divorce.

 

Suite au dépôt de la requête unilatérale ou conjointe, les parties sont ensuite convoquées par le greffe dans un délai de 15 jours à compter du dépôt de la requête, le délai de comparution étant de 8 jours. L’audience est ensuite fixée endéans un délai d’un mois à partir du jour de l’expiration du délai de comparution précité.

 

En cas d’accord sur le principe du divorce entre les parties, il importe de souligner que ces dernières peuvent se voir prononcer leur divorce dès la fixation de la première audience, et donc dans un délai considérablement rapide.

 

Dans l’optique où les parties ne seraient pas d’accord sur l’intégralité des conséquences du divorce ou sur d’éventuelles mesures accessoires, le Juge peut statuer à cet égard de manière séparée, plus tard, sans que le prononcé du divorce n’en soit affecté.

 

Un autre point non négligeable qui ressort de cette nouvelle cause de divorce est la possibilité désormais, au même titre que les lois portugaise et française, de pouvoir divorcer en l’absence de volonté réciproque en ce sens des époux et surtout sans la nécessité de devoir rapporter la preuve d’une faute dans le chef du conjoint absent ou qui ne consent pas à divorcer.

 

Si des avancées considérables peuvent être ainsi constatées quant à la procédure du divorce pour rupture irrémédiable de la vie commune, le même constat ne saurait être tiré en matière de divorce non-contentieux (B).

 

B – Le divorce par consentement mutuel réformé : vers une procédure complexifiée et ralentie ?

 

La nouvelle procédure de divorce par consentement mutuel implique de saisir le Tribunal par requête conjointe déposée au greffe, en y annexant la convention de divorce par consentement mutuel rédigée par un avocat ou par un notaire, les pièces légalement requises ainsi que l’établissement d’un inventaire des biens communs ou indivis soumis au partage.

 

Après le dépôt de la requête, le greffe convoquera également les parties dans un délai de  15 jours. Cependant, il échet de relever que le législateur a omis de mentionner de délai prévu pour la fixation de l’audience, de sorte que les parties ne sont aucunement assurées de bénéficier d’un délai bref pour la fixation de leur première audience devant le Juge aux affaires familiales.

 

Par ailleurs, une fois que le Juge aux affaires familiales aura convoqué personnellement les parties afin de voir confirmer leur volonté de divorcer, ce dernier va effectuer une analyse du contenu de la convention et rechercher si aucune clause n’est contraire à l’intérêt supérieur des enfants et si la convention ne porte pas une atteinte disproportionnée aux intérêts d’un des conjoints.

 

Si le Juge estime que la convention est de nature à porter atteinte à l’intérêt de l’enfant ou aux droits d’un des conjoints, les parties obtiendront un délai de six semaines pour modifier la ou les clauses et présenter une nouvelle convention. De nouveaux débats seront alors fixés à une audience ultérieure, au-delà de ce délai de six semaines.

 

Si aucune nouvelle convention n’est transmise dans le délai imparti, la demande en divorce par consentement mutuel sera déclarée caduque par jugement.

 

Le Juge pourra soit déclarer la convention modifiée adéquate et prononcer le divorce, soit juger la convention non adéquate et rendre ainsi une ordonnance de renvoi en formation collégiale, cette dernière composition ayant alors la possibilité d’homologuer la convention ou de rendre un jugement déboutant le prononcé du divorce.

 

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Par conséquent, force est de constater que contrairement à l’institution de la nouvelle cause de divorce pour rupture irrémédiable de la vie commune, le législateur a fixé de nouvelles règles de procédure en matière de divorce par consentement mutuel qui tendent à complexifier le régime tel qu’il existait auparavant, avec le risque d’aboutir, in fine, à un divorce plus tardivement que s’il avait été demandé sur le fondement de la rupture irrémédiable des relations conjugales.

 

Le recul et les applications futures qui seront faites en pratique de cette réforme démontreront si de telles craintes en terme de lenteur et de complexité sont justifiées.

 

En tout état de cause, le recours au cas de divorce contentieux pour rupture irrémédiable de la vie commune ne peut qu’être favorablement accueilli par les deux conjoints qui demeurent d’accord sur le principe du divorce et qui sont désireux de voir prononcer leur divorce rapidement.