L’(IN)FATIGABLE PANDEMIE : Le domaine de la danse pendant la crise du COVID-19 L’impact du Covid-19 sur la danse: Quid des conséquences des restrictions gouvernementales de lutte contre le Covid-19 ?

En avril 2020, les Comités Olympiques européens (COE) concluaient que « le sport est à même d’apporter une contribution significative, en ouvrant la voie au retour à la normalité, en particulier pour les enfants et les jeunes ». Des salles de sport privées aux Jeux Olympiques de Tokyo 2020, les pratiques sportives ont été bouleversées par la crise sanitaire du COVID-19 et sont souvent oubliées lors des discussions globales sur les impacts de la pandémie. Qu’en est-il de cette affirmation des COE neuf mois après l’éclatement de la crise sanitaire du Covid-19 en Europe et la déclaration de l’état d’urgence au Grand-Duché du Luxembourg ? 

Regards ciblés sur l’activité de la danse.

16 décembre 2020

Le 18 mars 2020, le Gouvernement luxembourgeois a déclaré l’état d’urgence dans le Grand-duché, prolongé par la suite jusqu’au 24 juin 2020. Pendant cette période, nos vies ont été mises en suspens pour combattre le nouveau coronavirus. Si l’été est arrivé avec une brise d’air frais et un retour déguisé à la normalité, ce n’est pas moins l’automne et l’hiver qui nous ont remis les pieds sur terre avec une hausse drastique des nouveaux cas d’infections et d’hospitalisations journaliers. 

La dernière loi en vigueur sur les mesures de lutte contre la pandémie du Covid-19 est la loi n°933 du 25 novembre 2020. En effet, elle vient restreindre, voire gommer les activités et loisirs « moins » essentiels de notre quotidien afin de limiter la propagation du virus. Tombent sous le champ d’application de ces activités : les sorties dans les restaurants, les sorties culturelles au théâtre et le sport. 

La loi prévoit donc la fermeture des établissements relevant du secteur sportif et l’interdiction des pratiques sportives groupées ou en salle à l’exception des sportifs d’élite, des équipes nationales seniors, des pratiques médicalement prescrites et des activités scolaires, parascolaires et périscolaires. Il est précisé que l’activité englobant plus de quatre acteurs sportifs est interdite à l’exception des sportifs d’élite et des équipes seniors. Il est ensuite indiqué que « la pratique d’activités récréatives en groupe de plus de quatre personnes est interdite ». 

Le 30 novembre 2020, dans une missive commune, douze écoles de danse s’interrogent sur le sort qu’aura réserver le gouvernement à leur égard suite aux nouvelles restrictions en vigueur. En effet, si la danse est considérée comme une activité physique, elle tombe également sous la définition des activités récréatives. 

L’Okaju, Ombudsman fir Kanner a Jugendlecher Mënscherechtshaus, dans ses observations générales n°17 de 2013, définit les activités récréatives comme «  un très large éventail d’activités, dont, entre autres, les activités musicales, artistiques et artisanales, les activités réalisées avec la communauté ou au sein d’un club, le sport, les jeux, la randonnée et le camping, et les passe-temps.».

C’est ainsi que dans un premier et court temps, le Ministère de la Santé a considéré que la danse tombait sous la définition des activités récréatives et était donc autorisée pour quatre personnes maximum. Cette prise de position ne va pas s’éterniser et les écoles de danse, à l’exception des conservatoires, vont rapidement se rendre compte que leurs activités, partant essentielles pour ceux qui les pratiquent, seront simplement oubliées par les nouvelles mesures. 

Comme le souligne la missive des écoles de danse et la Confédération nationale de danse du Luxembourg « Le ministère de la Culture, ainsi que les ministères de l’Éducation nationales et des Sports ont précisé que « nous ne faisons partie d’aucun des domaines dont ils ont la charge » ». La danse ne serait donc ni une activité physique, ni une activité récréative, mais simplement une activité économique qui doit obligatoirement fermer ses portes, car le risque d’infection y serait trop élevé. Néanmoins, les écoles de danse se sont toutes conformées aux gestes barrières en se soumettant au port du masque, à la distanciation sociale et à beaucoup de gel désinfectant dans leurs enceintes. 

C’est d’autant plus curieux que les mêmes activités de danse, peuvent continuer à être enseignées dans les Conservatoires, car selon le Ministère de la Santé « Les cours proposés au conservatoire sont à considérer dans le cadre des activités scolaires et sont donc autorisés ».

Le Ministère de la Santé est finalement venu comblé ce vide législatif en considérant que « la danse est considérée comme une activité physique à l’instar du yoga ou du fitness et non comme une activité récréative. Ce genre d’activité présente de surcroît le désavantage qu’elle implique un contact étroit avec son partenaire de danse multipliant ainsi les risques d’une contagion. Il en résulte que cette activité est interdite. »

Ainsi, il est important de rappeler qu’en cette période de crise, malgré de nombreuses et urgentes priorités, l’activité physique demeure essentielle aussi bien pour la santé physique que mentale et aide à atténuer stress et anxiété. Elle ne fait sans doute pas partie du problème, mais plutôt de la solution en apportant une lueur de « normalité » au cœur de la pandémie. 

Alors que le nombre des inscriptions et réinscriptions ont connu une forte chute pour le premier trimestre 2020/2021, les inscriptions de janvier s’annoncent d’autant plus tragiques. En effet, la loi n°992 du 15 décembre 2020 est venue prolonger les mesures actuellement en vigueur dans un premier temps jusqu’au 15 janvier 2021. 

Tandis que la loi du 26 novembre laissait place à une certaine marge d’interprétation en permettant la tenue de classes de danse de maximum quatre élèves avec obligation de porter le masque, la loi du 15 décembre, 2020 ne laisse aucun doute quant à l’interdiction des cours et quant à l’obligation de fermeture des écoles de danse. Le Conseil de gouvernement a apporté les changements nécessaires au projet de loi afin de pallier les ambiguïtés en prévoyant à l’article 3bis, paragraphe 2, point 2° que les « activités des centres de culture physique sont interdites ». 

Il existe cependant des dérogations prévues à l’article 4 de la nouvelle loi, qui permet aux artistes et danseurs professionnels de continuer à exercer leurs activités. En effet, l’article dispose : « l’obligation de distanciation physique et de port du masque prévue aux paragraphes 2, 3, 4 et 5 ne s’applique (…) ni aux acteurs de théâtre et de film, aux musiciens, ainsi qu’aux danseurs qui exercent une activité artistique professionnelle ». Il leur est ainsi possible de continuer à danser dans un but purement professionnel.

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La situation est très critique pour les écoles privées qui malgré les aides étatiques, n’arrivent pas à récupérer le manque d’inscriptions aux cours de danse. Les cours en ligne ne remplaceront jamais la convivialité d’un cours en présentiel. En attendant que la pandémie disparaisse, il ne reste à chacun que la possibilité de faire danser sa frustration.